'enfance dans l'autobiographie
exte 6
Les confessions-Rousseau
.
J'étudiais un jour seul ma leçon dans la chambre contigué à la cuisine. La servante avait mis
sécher à la plaque les peignes de mademoiselle Lambercier. Quand elle revint les prendre, il s'en
trouva un dont tout un côté de dents était brisé. A qui s'en prendre de ce dégât ? personne autre que
moi n'était entré dans la chambre. On m'interroge: je nie d'avoir touché le peigne. M. et
mademoiselle Lambercier se réunissent, m'exhortent, me pressent, me menacent: je persiste avec
opiniâtreté; mais la conviction était trop forte, elle l'emporta sur toutes mes protestations, quoique
ce fût la première fois qu'on m'eût trouvé tant d'audace à mentir. La chose fut prise au sérieux; elle
méritait de l'être. La méchanceté, le mensonge, l'obstination, parurent également dignes de
punition; mais pour le coup ce ne fut pas par mademoiselle Lambercier qu'elle me fut infligée. On
écrivit à mon oncle Bernard: il vint. Mon pauvre cousin était chargé d'un autre délit non moins
grave; nous fumes enveloppés dans la même exécution. Elle fut terrible.
Quand, cherchant le remède dans le mal même, on eut voulu pour jamais amortir mes sens
dépravés, on n'aurait pu mieux s'y prendre. Aussi me laissèrent-ils en repos pour longtemps.
On ne put m'arracher l'aveu qu'on exigeait, Repris à plusieurs fois et mis dans l'état le plus affreux, je
fus inébranlable. J'aurais souffert la mort, et j'y étais résolu. Il fallut que la force même cédát au
diabolique entétement d'un enfant; car on n'appela pas autrement ma constance. Enfin je sortis de
cette cruelle épreuve en pièces, mais triomphant. Il y a maintenant près de cinquante ans de cette
aventure, et je n'ai pas peur d'être puni derechef pour le même fait; hé bien 1 je déclare à la face du
ciel que j'en étais innocent, que je n'avais ni cassé ni touché le peigne, que je n'avais pas approché de
la plaque, et que je n'y avais pas même songé. Qu'on ne me demande pas comment le dégât se fit, je
l'ignore et ne le puls comprendre; ce que je sais très certainement, c'est que j'en étais
innocent.
Qu'on se figure un caractère timide et docile dans la vie ordinaire, mais ardent, fier, indomptable
dans les passions; un enfant toujours gouverné par la voix de la raison, toujours traité avec
douceur
,
équité, complaisance, qui n'avait pas même l'idée de l'injustice, et qui pour la
première fois en
éprouve une si terrible de la part précisément des gens qu'il chérit et qu'il
respecte le plus: quel
renversement d'idées I quel désordre de sentiments I quel bouleversement
dans son coeur, dans sa
cervelle, dans tout son petit être intelligent et moral!
Je dis qu'on s'imagine tout cela, s'il est possible; car pour moi je ne me sens pas capable de démêler,
de suivre la moindre trace de ce qui se passait alors en moi. Je
n'avais pas encore assez de raison
pour sentir combien les apparences me condamnaient, et pour me mettre
à la place des autres.
Je
me tenais à la mienne, et tout ce que je sentais, c'était la rigueur
d'un châtiment effroyable pour un
crime que je n'avais pas commis. La douleur du corps, quoique
vive, m'était peu sensible; je ne
sentals que l'indignation, la rage, le désespoir. Mon cousin, dans
un cas à peu près semblable, et
qu'on avait puni d'une faute involontaire comme d'un acte prémédité
, se mettait en fureur à mon
exemple, et se montait, pour ainsi dire, à mon unisson. [...]
Je sens en écrivant ceci que mon pouls
s'élève encore; ces moments me seront toujours présents, quand je
vivrais cent mille ans.
Pouvez-vous m’aider à trouver les figures de styles s’il vous plaît

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